Elle recueille des témoignages —la plupart du temps de femmes— et, de cette matière brute, qu’elle ne transforme pas mais met en scène, elle tire des livres qui ressemblent plus à des romans qu’à des enquêtes journalistiques. Ses entretiens sont des confessions, ses livres des absolutions.
Elle sait capter à merveille la vie quotidienne, celle d’un pays où tout le monde, ou presque, était pauvre, mais digne, et communiait dans l’idéal communiste.
Elle ne cache rien de sa cruauté, de sa bêtise, de son aliénation, de son échec. Petites existences au jour le jour de fonctionnaires, de techniciens, de soldats, d’ingénieurs, d’institutrices, de femmes de ménage, d’ouvriers, d’ivrognes... Petites misères, grandes peurs, petits espoirs: tout était morne et gris.
Mais dans ce pays des âmes mortes, l’humour et l’amour parvenaient toujours à se glisser. Et puis il y avait les livres, la puissance de l’Empire, la Russie éternelle…
l’idée de liberté, qui faisait tant rêver.
La voici, justement, qui déboule par surprise au début des années 90. Personne ne s’y attendait, ni les apparatchiks, ni les moujiks.
que sa promesse est belle!
Les lendemains de cuite sont toujours douloureux. Les usines (obsolètes) ferment, les fonctionnaires (inutiles) sont licenciés, les transports (vétustes), les hôpitaux (crasseux), les logements (minables) ne sont plus gratuits.
Les ingénieurs deviennent balayeurs, les professeurs vendeurs à la sauvette, les techniciens chômeurs.
Et tandis que le peuple russe s’enfonce dans la misère, Eltsine, parvenu au pouvoir, livre le pays à des affairistes, souvent anciens membres du parti, qui font main basse sur les entreprises, les banques, les richesse minières. Plus tard, on les appellera des oligarques.
Et l’on se prend à se demander si les nostalgiques du KGB et du Goulag n’ont pas raison (et ils n’ont pas tous 70 ans…): peut-être, en effet, que la liberté n’est qu’une putain, qui se donne seulement à ceux qui peuvent payer: les roublards et les bandits...
La fin de l’homme rouge n’a rien de sinistre. L’espoir, l’amour et le rire passent en se moquant de la médiocrité et de la veulerie.
Reclus dans son sarcophage du "102" (boulevard Haussmann), il jetait alors à la face des humains ce livre insomniaque, bizarre, entortillé, complexe, ce début de "cathédrale" qu'il comparait aussi à une "robe"
Cent ans plus tard, Marcel fait l'unanimit
Ce livre est un miroir : il ne reflète que l'âme de qui s'y mire. L'adolescent, l'amoureux, le vieillard, le mondain, l'imbécile, le vaniteux - lequel d'entre nous, au fil de sa vie, n'est-il pas celui-ci puis celui-là ?
André Breton affirmait que l'amour advient « quand on rencontre quelqu'un qui vous donne de vos nouvelles".
la Recherche vous donne sans cesse de vos nouvelles. C'est son privilège.
tout individu, ayant lu Proust et qui, lecture faite, osera prétendre qu'il est resté le même, est soit un menteur, soit une brute
dire, prouver, démontrer, qu'il est le plus drôle, le plus imprévisible, le plus affectueux, le plus lucide, des grands romanciers modernes.
vous visiterez Sodome et Gomorrhe, le ghetto mondain de la Plaine Monceau, des bordels sordides, la théorie du genre, la côte fleurie, des clients non "pénalisés" de putes féministes, Venise, les églises normandes, des tasses de thé, le Ritz - et, surtout, l'âme véritables de vos semblables.
Doris Lessing est l’auteure d’une œuvre riche d’une cinquantaine de titres qui a fait d’elle l’icône des marxistes, anticolonialistes, anti-apartheid et féministes.
Hantée par son enfance africaine, guidée par son engagement politique et anti-apartheid, elle a construit une œuvre éclectique, de la saga à la science-fiction en passant par le théâtre.
Le Golden Notebook a inspiré plusieurs générations, devenant la bible du nouveau féminisme du XXe siècle.